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Loin d'être un doltolâtre, je ne suis pas non plus de ceux qui l'abhorrent et rejettent tous ses apports. Néanmoins, je me pose une question depuis très longtemps : comment, une personne aussi intelligente et instruite soit-elle, peut-elle énoncer des hypothèses, seule, qui seront ensuite reprises comme paroles d'évangiles par d'autres ? Je reste persuadé que si Dolto a ouvert les yeux de beaucoup sur l'enfant et sa personnalité, elle n'a pas fait que du bien, ses théories dérivant dangereusement vers l'enfant-roi. Parlementer, certes, expliquer, pourquoi, pas, de temps en temps, mais des décisions parentales qui limitent, interdisent ou punissent me paraissent utiles, nécessaires et parfois saines. Ne pas frustrer n'est pas pour moi un principe d'éducation. J'entendais d'ailleurs l'inverse il n'y a pas très longtemps, mais j'ai oublié qui l'a dit (ne serait-ce pas Marcel Ruffo ?) : "Frustrez vos adolescents, ils vous remercieront", des études tendant à prouver que les ados non frustrés ont tendance à se réfugier plus facilement dans les addictions diverses.
Dider Pleux, psychologue, spécialiste de l'éducation des enfants, se penche sur le cas Françoise Dolto. Il énonce que comme Freud, elle a émis des avis qui se veulent désormais des dogmes. Il se fait évidemment étriller par les partisans des deux. Et pourtant, la contradiction me paraît saine, elle devrait nous permettre de décortiquer le travail des uns et des autres et d'en tirer le meilleur pour nous et nos enfants. On reproche à l'auteur de s'en prendre à la vie de F. Dolto, c'est vrai. Est-il utile de savoir qu'elle a frayé avec l'extrême droite, qu'elle a travaillé avec Alexis Carrel, eugéniste, partisan du gazage des handicapés, ardent collaborateur pendant la guerre, et que son comportement sous Vichy peut être mal interprété puisqu'il est trouble ? Est-il nécessaire de la contredire sur son enfance qu'elle dit avoir été traumatisante alors, que lettres à l'appui, D. Pleux dit qu'elle fut plutôt une enfant préservée, écoutée dans une famille aimante ? Je ne sais pas, mais cela peut aider à comprendre son cheminement, et pourquoi nier la réalité pour elle alors que d'autres n'ont pas eu cette chance ?
D. Pleux explique qu'elle se crée sa propre réalité à partir de sa psychanalyse : elle se focalise sur ce qui n'a pas été dans son enfance, reste bloquée dessus pour ensuite reconstruire sa réalité à elle, celle qui colle à ses idées. En France, "si le réel donne tort à l'idée, alors on change de réel afin de conserver l'idée à laquelle les idéologues vouent un culte ! " (Michel Onfray, dans la préface, p.5). Et toutes ses interventions sont ensuite basées sur ce réel qu'elle s'est recréé : elle pense en opposition à sa mère et son père à qui elle reproche maintes et maintes choses. Mais d'un cas on ne peut faire généralité. Et non, la crise d'adolescence n'est pas un passage obligatoire (même si cette période n'est pas aisée, rien n'empêche qu'elle se passe relativement paisiblement, ce que je remarque de plus en plus chez moi et autour de moi (pour le moment) étant parent d'ados et amis de parents d'ados plutôt sereins.
Un bouquin utile, sans doute excessif parfois, qui plutôt que de créer la polémique devrait inciter au débat d'idées entre psychologues et psychanalystes, et pourquoi pas, nous parents et enfants si nous ne sommes pas oubliés.
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