Le récit de Mgr Pallegoix compte certainement parmi les plus complets et les plus intéressants consacrés à la Thaïlande au cours du 19e siècle.
Homme instruit et curieux, Pallegoix parcourt le Siam dans tous les sens durant ses 32 années de résidence.
Observateur hors pair, il décrit les trajets, effectués la plupart du temps en barque ou à dos d'éléphant; il donne également une description détaillée des villes et bourgs visités, de la composition ethnique du pays. Il ne se limite pas à l'aristocratie locale, mais il décrit les hommes, du plus prestigieux au plus humble, dans le cadre de leurs activités quotidiennes. Naturaliste averti, il donne également un compte rendu passionnant des campagnes traversées, de la faune et de la flore, ainsi que de l'utilisation que les locaux en font.
Quand j'ai postulé pour ce livre, je n'avais pas en tête que ça serait un carnet de route d'un missionnaire en Thaïlande au 19ème siècle. En prenant conscience de cela, j'ai eu une double appréhension : la première sur la place de la religion chrétienne et la seconde sur la vision des populations autochtones. Et mes deux craintes ont vite disparu. Monseigneur Pallegoix contrairement à la majorité des missionnaires de cette époque ne s'est pas contenté de convertir la population, il s'est intégré à son pays d'expatriation et partage ici le résultat de sa curiosité. du coup, on a un guide de la Thaïlande au 19ème qui est étonnamment moderne et peu axé sur la religion du missionnaire.
Ici pas de récit linéaire mais une approche thématique (géographie, finance, culture…), ce qui permet d'éviter les redites et crée des chapitres très complets et instructifs. En revanche, ce choix d'organisation fait perdre l'aspect journal de voyage qui est un genre plus fluide à lire et donne des blocs sur des thèmes qui n'intéresse pas tous forcément, pour moi c'était l'économie et la liste de prix.
Ce qui m'a le plus marqué ici c'est l'ouverture d'esprit de l'auteur et sa vision très actuelle des non-européens. Il n'y a presque aucune tournure de phrases qui étaient monnaie courante à l'époque et complètement racistes avec notre regard actuel. Malgré quelques généralités sur le peuple thaï pas très valorisantes, le ton n'est ni condescendant, ni paternaliste ou dénigrant. C'est vraiment étonnant d'avoir un texte de cette époque avec un tel niveau de recul et de neutralité, qui ne juge pas (ou très peu) et présente de manière positive un pays colonisé.
Merci babelio et les éditions Olizane pour cette lecture intéressante
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