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Un jeune garagiste, Marc, « qui répare des choses inutiles depuis toujours », accepte de quitter la métropole et sa compagne Stef, pour rejoindre en Guyane son ancien patron, Julo. Celui-ci a un projet dément : devenu orpailleur, trafiquant d'or, il doit changer le moteur d'une monstrueuse pelle Caterpillar 215 qu'il a entrepris de faire convoyer par un ancien légionnaire Jo et un mystérieux Brésilien qui l'assiste dans cet enfer vert. La machine, après avoir avalé des kilomètres, est immobilisée au milieu de la forêt, loin de la mine sauvage. Aidé d'un piroguier, Marc rejoint les deux hommes et va s'atteler à réparer la bête d'acier et de feu au milieu du paysage dans lequel l'engin s'est frayé un passage en luttant contre la jungle à la fois fragile et menaçante. Les hommes vont alors lutter contre leur propre folie, contre cette nature qui les fait souffrir et qu'ils torturent en vain au pied de la pelleteuse, plantée au milieu de la forêt, à la fois imposante et ridicule. Enorme quand ils se tiennent à côté, ridicule face à ce qui l'entoure.
Marc répare tout et n'importe quoi. Il a longtemps vécu en Guyane. Il peine à trouver du travail depuis son retour en métropole et s'ennuie malgré la présence de sa femme et de ses deux enfants. Le couple galère, est toujours à court d'argent. Aussi, Lorsque Jules, son ancien patron par la faute duquel ils ont été obligés de quitter la Guyane, l'appelle et lui propose pas mal d'argent pour venir réparer une pelle Caterpillar 215, moteur cassé, coincée dans la jungle, Marc accepte.
Très court roman, presqu'une nouvelle, 120 pages en caractères assez gros et aérés. Mais rien ne manque, Antonin Varenne va au plus court. Il décrit la jungle, les deux hommes avec lesquels Marc va bosser : un ancien légionnaire qui se promène sur un fil prêt à tomber dans la folie et un mystérieux Brésilien, taiseux et pas forcément moins menaçant.
Le roman rend bien l'atmosphère lourde et pesante, poisseuse. Humidité qui colle aux corps. Climat et environnement qui rendent fous, alcool et drogue en sus pour perdre encore davantage l'esprit ou pour, au contraire, oublier tout cela et se concentrer sur le travail. La tension est palpable, on peut presque la toucher. Chaque homme se jauge, ne se déplace jamais sans une arme. Les face-à-face sont tendus. Le légionnaire peut exploser à n'importe quel moment. Pour qui a vu Apocalypse Now, on est un peu dans le même registre : tension, chaleur, humidité, violence latente qui peut éclore à chaque moment, animaux et hommes dangereux, nature hostile... Bref, tout pour faire un très bon roman qui débute ainsi :
"J'étais dans le garage quand le téléphone a sonné, j'ai essuyé mes mains sur un chiffon et attrapé l'appareil au milieu des outils. Quand j'ai raccroché, j'ai regardé ma voiture capot ouvert, j'ai fait le calcul des réparations, de ce que ça coûtait d'être fauché, de n'avoir que du matériel qui tombait en rade. Il fallait trois ronds, toujours, on en était là. Trois ronds." (p.7)
Pas tout à fait 100 pages pour ce bouquin incroyable où Antonin Varenne nous plonge dans l'enfer vert de la Guyane.
Pas tout à fait 100 pages pour se retrouver accablé par la moiteur de la forêt vierge, abruti par les cris des animaux, inquiet de la haine qui suinte partout, de la folie qui rampe et dévore la cervelle de Jo l'ancien légionnaire, des silences d'Alfonso le brésilien taiseux.
Pas tout à fait 100 pages pour s'imaginer au cœur de cette forêt plus forte que la pelle Caterpillar au moteur cassé, plus forte que ces hommes qui la craignent (et s'en échappent à coups de bière et de rhum) ou la vénèrent.
Pas tout à fait 100 pages pour se rendre compte qu'une nouvelle fois l'auteur nous bouscule avec une narration économe, directe, incroyablement évocatrice, dont le tempo s'accélère jusqu'à la chute.
Pas tout à fait 100 pages pour s'apercevoir qu'on aurait bien aimé en lire 100 ou 200 de plus pour rester un peu entre ces lignes !
Billet d'amour / Billet d'humour .
Aujourd'hui j'ai fait une courte virée en Guyane, en compagnie de Marc, mécanicien.
Étant dans une passe financière difficile, il a accepté de rejoindre une vieille connaissance .
"Le plus grand talent d'un escroc reste de savoir faire appel à votre naïveté . "
Son ancien associé véreux le conduit dans la jungle, vers un camps d'orpailleurs illégal, pour qu'il répare une pelleteuse Caterpillar.
"Te pose pas trop de question.Tu vas avoir une bonne nuit en hamac et une journée de marche pour te laver la tête de toute cette merde de réflexion que t'as ramené avec toi de la métropole ."
Marc y retrouvera deux mecs, peu sociables, et assez barrés, et il devra composer au mieux avec chacun, faire son taf, et tenter de rentrer en vie. C'est l'enfer dans cette forêt équatoriale si peu hospitalière. Le danger est partout, la lutte permanente, et la folie des hommes aussi sauvage que cet endroit .....
Quand j'ai su qu'un nouveau Varenne se profilait à l'horizon, j'étais comblée, et lorsque je l'ai eu en main, ma première réaction a été: "Non mais sérieux, même pas 100 pages et 9€, soit un euro toutes les 10 pages, c'est abusé."
Et si je ne vouais pas une adoration éternelle pour cette plume, je ne m'y serais pas attardé. Il m'a alpagué avec "Trois mille chevaux vapeur" (Prix du quai du polar 2014 ) et maintenant Antonin et Moi c'est pour la vie. Entre temps j'ai dévoré Fakir (Prix Michel Lebrun, prix du jury sang d'encre ),et Battues (prix de la ville 2016, Prix sable noir ) deux merveilles. D'autres m'attendent encore pour assouvir mes crises de manque en cas de boulimie livresque, et heureusement car cet encas CAT 215 m'a laissé sur ma faim. Ce fut bon mais beaucoup, beaucoup trop court, une nouvelle d'accord, mais pourquoi pas un recueil? Le bonheur aurait été plus grand .
Antonin, inutile de monter sur tes grands chevaux, mais tu peux tout de même organiser une Battue, convoquer ton fakir, ton kabyle, et ton marin, autour d'un gâteau mexicain et je te prie jusqu'au fruit de mes entrailles de revenir à bord de ton CAT 215 à toute vapeur pour m'offrir sur un plateau ( ah non là c'est Franck) mon prochain menu gourmet 5 étoiles, car là tu m'as mis au régime hyper strict, 100 grammes de mots, c'est léger pour ma gourmandise livresque. Je me demande si tes voisins l'ont trouvé celui-ci ... (pour ceux qui connaissent l'anecdote)
"On ne sait jamais, ici, ce que les gens ont entendu. Parfois ils savent, parfois ils croient qu'ils savent."
J'ai adoré cette petite douceur mais je reste affamée.
Allez-file, et reviens-moi vite avec un pavé comme j'aime .
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