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'Angélus des ogres' fait suite à 'Monstrueuse féerie' et sera suivi de 'Clapotille', mais les trois ouvrages peuvent se lire indépendamment.« J'habitais dans le service pour patients volubiles depuis ma décompensation poétique. Au fond, je crois avoir toujours su que cela se terminerait ainsi. Peut-être parce qu'il s'agissait du dernier lieu susceptible d'abriter une humanité qui ne soit pas encore réduite à une pensée filtrée suivant les normes d'hygiène. Ou plus simplement, parce qu'il n'y avait plus de place ailleurs dans le monde pour un personnage de conte de fées.Je dois pourtant reconnaître qu'il n'y avait rien eu de féerique dans les évènements qui avaient présidé à mon admission : ma rencontre amoureuse avec une Elfe avait terriblement mal tourné, et les Monstres de mon enfance en avaient profité pour ressurgir. Je m'étais retrouvé plongé à nouveau dans le désert de ma venue au monde, un monde étranger et dangereux, où je ne savais pas bâtir. Sur ma langue desséchée, les mots mouraient ou devenaient fous. Parfois, même, mon corps se déchirait, sans que je sache pourquoi. »
Deuxième opus, cet Angélus des Ogres suit Monstrueuse Féerie - deux titres, deux oxymores - dont j'avais trouvé l'écriture si belle. Ces livres nous parlent de la folie, cet état qui met ceux qui en sont atteints à un niveau différent du nôtre, ni vraiment ici, ni vraiment ailleurs.
La question que j'en suis venue à me poser c'est, est-ce que l'auteur, qui est psychologue clinicien, nous parle de lui et de sa folie ou bien n'est-ce qu'un personnage créé de toute pièce ? Car il me semble que pour pouvoir comprendre la folie il faut connaître un passage secret vers le monde de ceux qui en sont atteints. le narrateur est lui-même psychologue clinicien, et parti très loin dans les hautes sphères de la déraison.
Laurent Pépin nous parle de toutes sortes de gens qui souffrent de bouffées délirantes et il le fait avec une poésie insensée, sublime, peuplée de métaphores qui m'ont fait décoller du sol pour m'emporter près des nuages, me laissant croire que les névroses, les angoisses, les peurs et la folie sont magnifiques et éthérées. Alors que les peurs ne sont qu'un immense trou noir à l'intérieur du corps, une boule d'antimatière qui désintègre le cœur et font espérer la mort.
Sa prose est d'une beauté fantasmagorique et enchanteresse et elle susurre à l'oreille de la petite fille que j'étais et qui avait peur dans le noir, que des monstres vont venir la dévorer.
Cette lecture, belle et angoissante, m'a laissé comme l'impression que la folie pourrait être désirable si elle n'était pas aussi flippante. le côté artiste de la folie, qui brise les barrières, abolit les frontières et rend tout possible, se retrouve par ailleurs coincé dans un carcan d'angoisses et de terreur que nul ne peut ouvrir.
Une lecture superbe mais sombre et éprouvante qui laisse mon cœur pantelant.
Dans la directe lignée de monstrueuse féérie, on retrouve l’univers poétique de l’auteur. Au coeur d’un milieu qui pourtant voudrait se libérer de l’ambiguïté des relations entre folie et création, en cadrant les méthodes, qui excluraient la subjectivité du langage. Tuer les mots pour éteindre la pensée.
Lucie hante les pages, elle va très mal et porte en elle un fardeau qui la détruit. Près d’elle, le psy, soigné ou soignant, lui-même l’ignore parfois, lutte et l’assiste dans sa descente aux enfers.
Le pouvoir des mots, la magie du langage sont ici érigés au rang de panacée. Et pourtant, leur force se heurte parfois à une limite infranchissable, lorsque le drame originel a envahi un univers fragile.
On retrouve les personnages déjà croisés dans Monstrueuse féérie et la même ambiance onirique qui transfigure le décor du monde psychiatrique.
C’est avec un plaisir réitéré que j’ai parcouru ses lignes et découvert qu’un troisième opus suivra
Merci à Laurent pour sa confiance.
102 pages Flatland 29 septembre 2021
Merci à l'auteur ,Laurent Pépin ,de m'avoir permis la lecture de la suite de « Monstrueuse Féérie »où l'on retrouve le narrateur qui est psychologue dans un centre de psychiatrie .Il devient même un patient salarié pour être au plus prêt de ses patients et rencontre Lucy ,une anorexique sévère ,qui se transforme en ogresse la nuit . Ils vont vite s'aimer et tenter de s'aider mutuellement mais le mal est incurable .Un roman inclassable .
Avec Angélus des ogres, nous retrouvons le narrateur de Monstrueuse Féerie, l’intense première novella de Laurent Pépin. Ce second tome est tout aussi inclassable et surréaliste que le premier mais connaissant déjà le style de l’auteur je l’ai abordé avec plus de sérénité et je m’y suis sentie plus à l’aise, élément important pour être réceptif au sujet. Nous voici donc de retour au sein de l’hôpital psychiatrique, dans le service des « patients volubiles » où le narrateur, « patient-salarié », voit son bureau se transformer en chambre de soins, lieu de rencontres pour les Monuments (patients internés). Au contact des autres, ces êtres en proie à de sévères problèmes psychologiques, réapprivoisent la parole. N’est-ce pas déjà reprendre le contrôle de sa vie ? Mais la direction du centre décide d’adopter de nouvelles méthodologies qui bouleversent les patients : leur but est de filtrer les pensées singulières pour les entraver. Le narrateur qui jusqu’alors considérait son métier de psychologue comme un poste d’assistant auprès d' »inventeurs » se retrouve perturbé par ces nouvelles mesures.
« Il faut bien reconstruire le monde à sa façon, on ne peut quand même pas le prendre tel qu’il est. »
Autour de lui gravitent d’autres personnages parmi lesquels Lucy qui a un rôle à part entière dans le récit (tout comme l’Elfe dans le tome 1). Lucy est une jeune anorexique dont le narrateur devient le confident, l’ami très proche. Elle possède un don bien particulier, celui d’attraper « les fragments de vie résiduel », autrement dit elle a la capacité de capturer les Monstres qui peuplent les esprits, notamment ceux du narrateur. Mais pour quelle raison s’obstine t-elle à lui imposer cette règle : ne surtout pas la voir entre minuit et cinq heures du matin ?
J’adore le grain de folie des textes de Laurent Pépin, peuplés de personnages aux pensées à la fois désopilantes et profondes, d’une sincérité désarmante. Ces êtres enfermés dans un asile psychiatrique ont finalement une liberté de penser que peu de personnes soi-disant « libres » ou « normaux » connaissent. La force de création de l’auteur m’interpelle: il nous propose une réflexion sur la puissance des mots, et au delà de cela, à mon avis, une réflexion sur l’importance de l’intégrité face à la culture de masse. Si l’originalité de son écriture impose un minimum d’ouverture d’esprit, ainsi qu’une lecture au second degré, son style poétique et son imagination débordante sont très surprenants.
Si l’univers déjanté et fascinant de Laurent Pépin vous attire, je vous conseille de lire dans un premier temps Monstrueuse Féerie, avant celui-ci qui confirme véritablement l’originalité de l’auteur. Je le remercie vivement pour sa confiance renouvelée.
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