Interview de l’éditrice d’"Attachement féroce" de Vivian Gornick
Interview de l’éditrice d’"Attachement féroce" de Vivian Gornick
Dans ce court essai, Vivian Gornick évoque plusieurs des œuvres vers lesquelles elle est revenue. Et à chaque ressenti autour de ses retours vers une terre littéraire aimée, elle associe des sortes de notes autobiographiques. Comme si les ouvrages étudiés laissaient voir des fragments de son existence.
Il est question d'identifcation aux personnages. Une identification qui évolue avec le temps. Comme pour Amants et Fils où Vivian se sent connectée tour à tour à Paul Morel, Gertrude et à Clara et Miriam.
Il est question d'analyse de textes et de souvenirs qui n'étaient pas exactement raccord avec la vérité des mots. Mais peut-on parler de vérité des mots quand chaque relecture emmène vers d'autres impressions ?
Il est question de récits découverts au mauvais moment et de cette peur de toute lectrice ou de tout lecteur de ne pas avoir abordé ces récits à la bonne heure.
Il est question de lecture ou de relectures échos. Comme si instinctivement, à certaines ères de notre parcours de lecture, on allait vers des histoires qui se répondent ou se complètent.
Il est question d'auteurs ou d'autrices que je ne connaissais pas et qui ont forcément rejoint la liste (bien trop longue) de mes envies.
Il est question (et cela m'a réjouie) de Colette et de toutes ces émotions que j'ai ressenties aussi quand je l'ai découverte à l'aube de la vingtaine.
Bref, vous l'aurez compris : un court essai intéressant mais également éminemment personnel. Ce qui fait que pour certains chapitres et certaines réflexions de l'autrice, je me suis trouvée un peu en dehors. Comme hermétique à son propos.
Je conseille donc Inépuisables à ceux et celles qui relisent et à ceux et celles qui ne craignent pas qu'on leur apprenne tout de l'intrigue du roman évoqué.
Inépuisables m'a donné envie de me replonger dans des essais autour de la lecture et des protagonistes. A commencer par le si réussi How to be a heroine de Samantha Ellis. Ou comment relire encore une fois des propos aimés.
En s’y baladant, Vivian Gornick, nous fait découvrir le New-York où elle est née puis où elle a suivi ses études avant d’y enseigner l’anglais à l’université d’État et au Hunter College avant de devenir journaliste et écrivaine.
Tout en soliloquant, elle nous livre une large part autobiographique désordonnée via l’errance de ses pensées spontanées et pêle-mêle et à travers l’interaction de ses rencontres.
Au rythme de ses promenades, résonnent l’âme d’une femme qui s’explore, sa mémoire et ses ressentis concernant ses relations amicales, amoureuses, sexuelles, ses rencontres professionnelles, ses lectures et de nombreuses anecdotes qui donnent à réfléchir.
Elle capture et commente des bribes de conversations ou des scènes du quotidien dans un café, à la caisse d’un magasin, un hôpital, une maison de retraite, un musée ou autre endroit où ses pas la mènent au hasard des rues et de la vie.
Aussi, elle sait rendre une photo d’ambiance très réaliste de New-York après l’attentat terroriste de septembre 2001.
Féministe, elle sait décrire l’atmosphère de New-York à la fin des années 60/ début des années 70 avec l’avènement des mouvements pour la libération des femmes.
« A la fin du dix-neuvième siècle, plusieurs génies littéraires ont écrit de grands livres sur les femmes des temps modernes. (…) c’est ‘Femmes à part’ de George Gissing qui me parle le plus. (…) Son livre pose cette question : que doivent être les hommes et les femmes pour eux-mêmes, mais aussi les uns par rapport aux autres ? »
Les réflexions disparates et la description de quelques situations vécues par l’auteure propre compagne à sa solitude, sont souvent des miroirs inopinément tendus au lecteur.
« Quand j’ai eu soixante ans, c’est comme si on m’avait annoncé qu’il me restait six mois à vivre. (…) Autant il n’a pas été si compliqué d’arrêter de rêvasser, en revanche, comment affronter le présent quand on l’a fui pendant des années. (…) A l’époque, j’ai beaucoup pensé à l’expression ‘moments d’être’ de Virginia Woolf, parce que je n’en avais aucun. »
Réminiscence proche de la rêverie, le texte est généreux en anecdotes et connaissance littéraires.
Vivian Gornick rédige un émouvant et très bel hommage à Beckett en fin de livre par la voix d’un de ses amis, l’acteur John Dylan « qui a vécu toute sa vie en compagnie de Beckett ».
Dans la résonance de paroles empilées de la ville, c’est avec une voix érudite et riche d’une essence universelle, que ce livre nous donne rendez-vous avec une intéressante promenade de l’esprit.
J’intercale dans les romans de la rentrée un formidable texte autobiographique, qui vient de paraître en poche chez Rivages. Un texte marquant.
Années 50 à New York, dans le Bronx. Un immeuble décrépit habité de familles juives, toutes communistes, où les femmes, fortes en gueule, s’interpellent de cuisine en cuisine. Entre confidences et cancans, rien ne leur échappe de la vie des voisines.
La narratrice a une douzaine d’années quand s’ouvre le récit. Comment vivre et grandir entre un frère plus âgé qu’elle et une mère à la très forte personnalité, rêvant et jouant l’histoire d’un grand amour avec son mari? Quand celui-ci meurt soudainement, tout s’effondre et la mère entre dans une profonde dépression qui étouffe et marque à jamais ses enfants.
Avec les années, la jeune fille quitte la maison pour l’université, étudie, se marie, divorce, a des amants. Tout cela sous les yeux et les critiques de sa mère pour qui elle éprouve – et réciproquement – un attachement féroce, dans une relation d’amour-haine.
Un livre qui évoque la longue dépression d’une mère et ses répercussions sur sa fille ne pouvait que m’interpeller et me toucher, c’est du vécu malheureusement. Son écriture incisive, ses images extrêmement évocatrices m’ont plongée dans cet univers quasiment en apnée.
Attachement féroce, Vivian Gornick, Rivages et Rivages poches
«La Femme à part» de Vivian Gornick est un livre à part, protéiforme, signé par une intellectuelle à l'esprit sinueux mais capable de fulgurances. Autobiographie autant qu'essai sur les relations humaines et le sens de la vie, cette œuvre dresse aussi le portrait de New York et de ses habitants dans les années 1960-70. Il était temps qu'on la lise en France.
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