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Tout à fait d'accord avec la critique de Dominique Sudre, un livre unique et émouvant.
Cette vieille dame qui enregistre sur un petit magnétophone le journal d’une année de vie dans sa maison de retraite est un personnage extraordinaire. Sa mémoire est intacte, son imagination fertile, sa curiosité pour les autres et son attention à la beauté du monde insatiables, et le dialogue qu'elle poursuit la nuit avec la mort qu’elle affronte comme un adversaire légitime, tout nous séduit chez elle. S’ajoutent des instants mémorables entre mère et fille dont les divergences, souvent littéraires, provoquent quelques affrontements savoureux.
Un témoignage réussi sur les grandeurs et misères de nos fins de vie.
La maman de Lidia Jorge vit ses dernières années à l' « Hôtel Paradis », un établissement pour personnes âgées.
A demi paralysée, elle ne parvient plus à écrire que quelques lignes de temps en temps.
Elle enregistre alors ses pensées et les faits de sa vie et de la maison de retraite sur un petit dictaphone.
38 heures des témoignages de Maria Alberta Nunes Amado que sa fille va retranscrire dans ce livre.
Elle a toutes ses facultés intellectuelles, son caractère est toujours aussi affirmé et bien trempé mais le corps a du mal à suivre, et dépendre des autres n'est pas facile.
Une année de vie cloîtrée racontée avec humour, énervement, émotion, angoisses........
A l'image de ce que doit être la vie dans ces établissements de retraite, le livre m'a semblé aussi long que doivent être les journées pour les résidents.
C'est assez répétitif et le temps ne semble pas passer.
Un livre qui m'a semblé très long à lire et dans lequel à vrai dire je n'ai pas retrouvé de réelle émotion.
Mais, malgré mon ressenti, je trouve très beau le fait que Lidia Jorge l'ait écrit, bel hommage et reconnaissance à sa mère.
elle qui nous parle est une vieille dame qui s’enregistre sur son Olumpus note Corder DP-20. Ce sont douze mois de paroles, d’émotions, de pensées, de souvenirs, de questionnements, d’amitié ou d’inimitié, d’interrogations, de vie. Du 18 avril 2019 au 19 avril 2020. douze mois ponctués par une pandémie de COVID qui a séparé les familles et éloigné les proches de leurs parents âgés placés en maison de retraite, contre ou selon leur gré.
Maria Alberta Nunes Amado, Dona Alberti a décidé de quitter sa grande maison, trop vieille, trop fragile, c’est devenu trop difficile. Il faut dire qu’elle a fait une mauvaise chute, s’est cassé les poignets, et ne peux plus vivre seule chez elle. Elle a choisi de se replier dans une maison de retraite, la solution la plus raisonnable pour ne pas dépendre de sa fille, l’autrice Lidia Jorge.
Des aides plus ou moins sympathiques, plus ou moins efficaces, s’occupent des pensionnaires.
Mais Dona Alberti a toute sa tête, et quelques obsessions, comme de connaître sur le bout des doigts les villes et capitales des pays qu’elle a parcouru inlassablement dans son atlas ou sur son globe terrestre. Et lorsqu’un manque à l’appel et que sa mémoire est défaillante, c’est la panique.
Dans cette maison de retraite, il est passionnant d’observer ses coreligionnaires. Femmes seules encore amoureuses à leur age, vieux monsieur encore fringuant, ceux qui rouspètent, ceux qui acquissent sans réfléchir, ceux qui décident de se révolter. Chaque jour apporte son lot d’étonnement, scénette drôle ou pathétique, dialogue ou dispute, éclat de voix ou sentiment caché, que la vieille dame décrit avec humour attention, subtilité, intérêt.
Les petits bonheurs simples, le repas qui est souvent mauvais mais parfois recèle quelque surprise, les relations entre les différents pensionnaires, les attitudes du personnel, parfois voleurs, souvent pressés, la maltraitance suggérée et parfois décrite, même s’ils sont aussi attentionnés, sympathiques, attachants.
La mort, omniprésente, la place vide dans le cercle restreint autour de la table dans la salle à manger, le nom d’un voisin que l’on efface vite de sa porte pour y mettre le suivant, celui qui s’écroule devant tout le monde, celle qui disparaît dans la nuit.
La nuit et ses ombres qui rôdent, qui annoncent la mort, cette ombre qui ne veut plus la quitter et dont elle sait qu’elle viendra la chercher, elle aussi, bientôt.
Enfin, en filigrane et cependant omniprésente ou largement décrite, la relation d’une mère et de sa fille, les questionnements, les reproches, les suggestions parfois cocasses, l’amour fou qui les unit, la douceur, leurs retrouvailles, leur entente malgré toutes leurs incompréhensions.
Quel roman, que d’émotions lors de cette lecture. C’est à la fois drôle, désespéré, humain, plein de malice et de compassion, de fatalisme et d’espoir, aussi lumineux que triste. Une lecture que je n’oublierai pas de sitôt tant ces réflexions sur la vie et la mort, sur l’amour d’une mère pour sa fille m’ont touchée.
https://domiclire.wordpress.com/2024/01/02/misericordia-lidia-jorge/
Dona Alberti n'en a pas fini avec la vie
Couronnée par le Prix Medicis étranger, Lidia Jorge raconte dans Misericordia la vie de Dona Alberti, pensionnaire d'une résidence pour personnes âgées. Avec humour, émotion et sensibilité.
Quand la nuit vient l'envelopper, Dona Alberti joue avec elle. Aux questions qu'elle pose, combien y a-t-il de villes au monde? Quelles sont toutes les capitales? De quel pays Bakou est-elle la capitale, il le faut trouver une réponse. Une belle manière d'aiguiser sa mémoire, de se rappeler ce Grand Atlas qu'elle feuilletait quand elle était encore dans sa maison.
Car désormais Dona Alberti vit à l'Hôtel Paradis, une résidence pour personnes âgées. D'avril 2019 à avril 2020, elle a enregistré son quotidien et ses souvenirs sur un magnétophone. Ce roman en est la "transcription infidèle", car les 38 heures sont résumées et livrées sans les sentiments perçus à l'audition, mais aussi structuré et divisé en chapitres, accompagné de titres. En d'autres mots, une manière habile pour Lìdia Jorge de mettre en scène son travail d'autrice.
Voici donc défiler le personnel, entre ceux qui s'impliquent et s'intéressent aux résidents, Salomé, Maria Lina, Lila, Lilimunde et ceux qui préfèrent les ignorer. Lilimunde, sans doute l'une de ses préférées, parce que sa venue s'accompagne d'un parfum de bergamote, de tilleul, de cèdre et de pivoine. Mais on verra au fil du livre combien ces effluves peuvent varier en fonction des occupations et des relations de l'aide-soignante. L'occasion aussi de souligner l'importance des odeurs et des parfums dans ce récit qui éveille à la sensualité.
Voici aussi défiler les autres résidents, avec leur passé, leurs histoires, mais aussi leur quotidien, pas toujours très rose, comme ce jour où M. Paiva avait tenté de fuir et s'était cogné à une vitre. Ou quand un autre résident ne s'est pas relevé. Le tableau dans l'entrée où s'affichent les portraits des pensionnaires devient alors une sorte de macabre décompte des décès, à mesure que les photos sont décrochées, comme une sorte d'avertissement.
Voici enfin la vie de Dona Alberti elle-même, au fil des jours et des nuits. Ces nuits qui la hantent et qu'elle combat durant ses insomnies. Ces nuits qui sont la métaphore d’un mot qui n’est jamais prononcé, la mort. Ces nuits peuplées de questions, simples ou métaphysiques, de Bakou à l'univers.
Mais, si elle a parfois du mal à trouver ses mots, elle se bat. Elle va chercher à profiter de chaque instant, d'un (trop) bref coup de fil de sa fille exilée à des milliers de kilomètres, de la visite d'un jeune homme chargé de lui faire la lecture.
Désormais pour elle tous les menus détails de l'existence sont importants. L'invasion des fourmis dans l'établissement puis leur éradication devient une épopée, tout comme ce confinement imposé presque en catimini et qui – malgré les dégâts qu'il cause – va resserrer les liens entre le personnel et les pensionnaires. N'est-ce pas là l'essentiel?
C’est à la demande de sa mère, et en s’inspirant de sa vie, que Lidia Jorge a écrit ce livre. Ce qui donne encore davantage de sel aux réflexions de Dona Alberti sur cette fille qui la délaisse et ne prend plus le temps d’écouter sa mère, sur cette romancière qui n’arrive pas à bien finir ses livres, sur ce pessimisme qui semble l’habiter.
À l’inverse, on peut lire entre les lignes le respect de la fille pour cette mère qui se bat, la culpabilité face à ses absences trop répétées, l’admiration pour les paroles qu’elle découvre, la poésie qui émane des enregistrements ponctués de courts poèmes. Alors le roman devient un hymne à l’écriture, à ces mots que l’on ne veut ou ne peut pas dire et qui trouvent ici toute leur puissance, parce qu’ultimes. Une manière aussi de transcender la mort, de «faire l’amour avec l’univers».
NB. Tout d'abord, un grand merci pour m'avoir lu jusqu’ici! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre. Vous découvrirez aussi mon «Grand Guide de la rentrée littéraire 2024». Enfin, en vous y abonnant, vous serez informé de la parution de toutes mes chroniques.
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