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En 1968, une relation amoureuse entre une professeure et son élève de 16 ans.
L'auteure relate cette affaire judiciaire de A à Z sans jugement.
Un documentaire abouti que j'ai lu d'une traite.
Les dernières pages sont consacrées à des photos des deux protagonistes et des lettres écrites par Gabrielle, la professeure.
Un roman court et intéressant sur un fait divers qui avait secoué le pays à l'époque.
Une histoire dramatique qui a été adaptée en film "Mourir d'aimer" sorti en 1971 que je vais essayer de regarder.
C'est le troisième livre que je lis de Pascale Robert-Diard. L'autrice propose toujours des ouvrages pertinents que je recommande.
https://www.instagram.com/claudia.passionlivres/?hl=fr
Fait divers de 1967-1969 – Histoire d’une passion hors la loi qui inspira le film Mourir d’aimer
Gabrielle Nogues est une femme de 30 ans tout juste agréée de français et qui vient de prendre son poste dans les quartier Nord de Marseille. Elle est mariée, à deux enfants, et elle est en instance de divorce.
C’est une professeure qui écoute ses élèves, les encourage et parfois se joint à eux ou eux à elles.
Pendant la période 68, elle se cache à peine pour embrasser un de ses élèves – Christian - âgé de 16 ans.
Bientôt les professeurs sont au courant, le lycée, mais aussi les parents de Christian.
Il s’ensuit des menaces et des dépressions à tous deux.
Elle veut quitter le lycée…Finalement, elle est mutée à Rennes alors qu’elle souhaitait Aix-en-Provence.
Les amants se retrouvent, mais surveillés, ils se font attraper par la police dans la voiture de Gabrielle.
Le père porte plainte officiellement pour enlèvement et détournement de mineur.
Gabrielle fera que 50 jours de prison car au vu des éléments à charge, la détention ne se justifie plus.
Le père pense que ce n’est pas de l’autonomie que fils à besoin, mais de soin. Aussi, il le fera interné à la clinique psychiatrique de l’Emeraude. Christian s’enfuira.
En fuguant, Christian a signé la perte de son amante et Gabrielle le sait.
Elle est incarcérée pour détournement de mineur et doit attendre son jugement.
Finalement, le jugement prononce douze mois d’emprisonnement avec sursis, 1500 francs d’amende et un franc symbolique en faveur des parents.
Bien évidemment le proviseur du lycée très mécontent fait appel du jugement.
Nouvelle dépression pour Gabrielle et prise de médicament. Mais son état se veut rassurant.
Finalement, elle mettra fin à ses jours par voie médicamenteuse et un tuyau de gaz dirigé vers sa chambre.
Le président de la République de l’époque – Georges Pompidou, demande à un journaliste qu’on l’interroge sur ce fait divers et il y répondra :
« Comprenne qui voudra,
Moi mon remords ce fut,
La victime raisonnable
Au regard d’enfant perdue,
Celle qui ressemble aux morts,
Qui sont morts pour être aimés
C’est de l’Eluard. Merci, mesdames et messieurs »
Il s’est dit également choqué et dit que l’appareil judiciaire s’est comporté « comme le plus froid des monstres froids » mais hors micros et hors caméras.
Christian à 70 ans cette année et s’occupe dans le Lot d’un élevage.
C’est une histoire d’une professeure qui s’était promis de faire aimer à ses élèves les poèmes d’Eluard.
Que retiendrez-vous de cette histoire d’amour hors la loi ?
http://voyagelivresque.canalblog.com/archives/2021/09/09/39127417.html
De cette histoire, je ne connaissais que la base réduite et la chanson d’Aznavour Mourir d’aimer. Autant dire peu de de chose.
Avec Comprenne qui voudra de Beauregard & Robert-Diard, j’en ai découvert un peu plus : les billets doux échangés et cachés, la filature (!), l’acharnement de la justice, les fugues de Christian, les moments partagés entre les deux amants, les amis du couple (des élèves souvent), l’époque autour de mai 68 qui encourage à plus de liberté, à un renouveau de pensée et incite à toutes les audaces.
Vous l’aurez compris ce livre est assez complet malgré le peu de page qu’il possède. Et avec cette référence à mai 68, nous plongeons dans l’ambiance de l’époque pour mieux comprendre le drame de cette histoire. On se retrouve ainsi au cœur d’une époque ouverte sur les choses nouvelles, mais également encore très traditionnelle comme l’indique le comportement des parents de Christian Rossi, - communistes mais dont le progrès s’arrête à la porte de leur maison. Bien que plus largement on retrouve cette dichotomie dans la société française, des journalistes aux artistes en passant par les politiciens, l’affaire Gabrielle Russier secoue la société française.
Mais qui était Gabrielle Russier ? A part cette prof investit corps et âme dans son travail, et qui saura tisser des liens avec ses élèves en partageant des moments au ski ou encore à la plage. Gabrielle Russier c’est avant tout une femme en instance de divorce, mère de deux enfants vivant dans un appartement des quartiers nord de Marseille. Elle est une femme de son époque : enjouée, passionnée, libre, mère aimante, c’est une femme qui aime la littérature, son métier et la vie. A priori rien qui annonce son suicide. Et pourtant suicide il y aura.
Tout ça à cause d’une histoire d’amour. Une banale histoire d’amour entre un élève et sa prof, où l’un est l’autre ont un peu perdu la tête dans le feu de la passion. Mais alors qu’il pensait l’amour sans frontière, la réalité va rattraper ce jeune couple qui ne plaît pas à la société bourgeoise de l’époque et notamment aux parents de Christian Rossi qui feront tout pour écarter leur fils de cette femme mature. D’internement pour Christian, à la prison pour Gabrielle, l’acharnement judiciaire contre cette femme coupable est sans commune mesure. De filature en perquisition, en passant par la case prison, Gabrielle Russier va subir les foudres de la justice française qui à l’époque est trop sévère pour des choses qui ne méritent pas tant de sévérités. (Aujourd’hui c’est plutôt l’inverse.)
Je ne vais pas vous mentir, l’histoire est terrible. Gabrielle est traitée comme la plus infâme des criminelles, et la justice rendue me renvoie l’image d’une machine à broyer, et ce même pour moi qui suis pourtant très carrée sur les lois et les règles. Même si je n’oublie pas de laisser à chaque époque les lacunes de sa justice et sa mentalité.
Cependant, si je trouve le traitement de cette affaire infâme pour l’absence de crime - Christian étant consentant et à 16 ans il est grand garçon quand même -, j’avoue, que j’ai du mal à comprendre cette passion irraisonnée entre les deux êtres et qui n'était pas faite pour durer étant donné que c'était plus passionnel qu'autre chose. Ce gâchis d’une vie pour ce qui n’aurait été qu’une passade, peut-être une longue passade mais une passade tout de même, je trouve cela regrettable et incompréhensible. Il est évident que tout bon sens avait disparu chez ces deux êtres. Et qu’on ne me parle pas de lucidité car il est évident qu’il n’y en avait pas. Lorsque l’amour est raisonnable on peut supporter les interdictions, les années, et les accords que la justice impose.
En conclusion, c’est un livre à lire pour mieux comprendre une histoire qui a fait parler beaucoup d’elle à une époque. Surtout qu'il est accompagné des lettres, des photos, de Gabrielle et Christian.
Le livre de Pascale Robert-Diard et Joseph Beauregard retrace de façon concise le résultat de leur enquête sur l'histoire tragique de Gabrielle Russier. Une centaine de témoins, dont plus d'une vingtaine sont les anciens élèves de la jeune professeure, ont évoqué leurs souvenirs et confié leurs archives personnelles aux deux auteurs. Le récit que ceux-ci ont construit se fonde sur des faits, narrés dans un style journalistique bref, dont l'objectivité ne semble pas pouvoir être mise en doute.
Faut-il rappeler l'histoire dont André Cayatte a tiré un film "Mourir d'aimer", sorti en 1971, avec Annie Girardot dans le rôle principal ? Le résumé tient en quelques lignes : jeune professeure de français et latin, mère de deux enfants, Gabrielle Russier, 30 ans, est nommée au lycée Nord de Marseille en septembre 1967. Proche de ses élèves, elle partage avec eux sa passion pour la littérature et n'hésite pas à les rencontrer en-dehors du lycée, au café, chez elle et à lier avec eux des liens amicaux. Avec l'un d'eux, Christian, lycéen de 16 ans, elle vit une histoire d'amour. Alors que Mai 68 voit fleurir des slogans tels que "il est interdit d'interdire", les parents du jeune homme, professeurs d'université pourtant proches des idées défendues par les étudiants, portent plainte pour détournement de mineur.
Après un séjour en prison et une condamnation avec sursis, amnistiable dans le contexte de l'élection présidentielle, Gabrielle Russier doit affronter un nouveau procès en appel. A bout de résistance, elle se suicide le 1er septembre 1969.
Le 22 septembre, en réponse à la question d'un journaliste évoquant Gabrielle Russier lors d'une conférence de presse, Georges Pompidou, nouvellement élu à l'Elysée, cite un passage d'un poème que Paul Eluard écrivit en 1944 en hommage aux femmes qui furent tondues :
"Comprenne qui voudra,
Moi mon remords ce fut,
La victime raisonnable
Au regard d'enfant perdue,
Celle qui ressemble aux morts,
Qui sont morts pour être aimés"
Habile manière de dire sa compassion sans prendre parti ! "La presse cherche des coupables" (p.145) et l'opinion publique se déchire entre les tenants de la liberté d'aimer et ceux qui s'effraient de voir une professeure défier l'autorité parentale et sortir de son devoir de réserve. Par des extraits d'articles judicieusement choisi, les auteurs montrent le choc causé par la mort de Gabrielle Russier, mais aussi les questions, les hypothèses, les avis péremptoires des uns et des autres. Un dossier d'archives photographiques et de textes écrits par la jeune femme conclut ce document lapidaire.
Evidemment j'ai été intéressée, passionnée même, par ce récit, diablement bien construit et si bref qu'il semble aller tout droit à l'essentiel. La forme est, à mon avis, cohérente, parfaite.
Ceci dit, il n'est pas facile de faire abstraction du fait divers et de ne se centrer que sur le livre et sur la manière dont il l'aborde. Et là, je me sens un peu mal à l'aise car il me semble que, même si les auteurs fondent leur enquête sur des faits, la manière d'agencer ceux-ci, de les mettre en relation ou en opposition, exprime un point de vue. Leur point de vue (partagé avec beaucoup, dont je suis, mais là n'est pas la question). Je suppose que les parents de Christian auraient construit un tout autre récit à partir strictement des mêmes faits. Si bien que j'ai l'impression que "Comprenne qui voudra" va beaucoup plus loin que l'histoire de Gabrielle Russier et qu'il engage des interrogations, des réflexions sur le rôle de chroniqueur judiciaire, sur celui de journaliste, d'une manière générale, mais aussi sur le fonctionnement de la justice. Car, finalement, cette enquête journalistique utilise la méthode d'audition de témoins, tout comme l'enquête judiciaire. Mais dans quelle mesure les témoins sont-ils fiables puisque, eux aussi, font un récit à partir de leur propre point de vue ? En définitive, c'est assez vertigineux comme perspective !
Cette enquête ouvre également tout un champ de questions d'un autre ordre : qu'en serait-il aujourd'hui ? Un ou une professeur-e amoureux-se d'un élève de 15-16 ans pourrait-il-elle éviter absolument la colère, l'incompréhension, les accusations des parents et d'une partie de la société ? Certes, un couple célèbre nous laisse penser que les temps ont changé depuis Gabrielle Russier. Mais est-ce vrai pour tout le monde et quel que soit le contexte ? Est-ce que là aussi tout ne serait qu'une question de point de vue ? Selon que l'on se place du côté de l'amour, du côté de la loi, du côté de la morale bourgeoise, du côté des parents, du côté de l'adolescence, du côté de la confiance ou du côté de la peur...
Les deux journalistes mettent en évidence l'influence probable des évènements de mai 68 sur le déroulement de l'histoire. Les désillusions qui suivirent sont aussi celles de Gabrielle et l'histoire de celle-ci se confond avec celle du mouvement vers une autre société. En 1969, un homme marche sur la Lune, Gabrielle Russier met fin ses jours et les pavés sont rangés.
Vous l'aurez compris ce livre n'a pas fini de me faire gamberger ! Mais je n'oublie pas non plus que c'est avant tout un bel hommage plein de compassion pour "une femme amoureuse de 32 ans, qui avait voulu croire que 1968 était la "première année du monde"" (p.161).
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