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Ray Carney vendeur de meubles et d’objets décoratifs a décidé de se retirer du circuit et d’arrêter son activité de receleur. May sa fille rêvait d’assister au concert des Jackson Five, mais il n’y avait plus un seul billet de disponible, alors Carney se décida à appeler Munson, Il ne savait pas ce que faisait l’inspecteur en ce moment, ni ce qu’il magouillait, mais si Munson avait le même carnet d’adresses qu’autrefois, ces places pour les Jackson Five étaient dans la poche, de bonnes places, près de la scène. Qu’est-ce qu’on ne ferait pas pour sa fille. C’est ainsi que Carney revint aux affaires. Un voyou reste un voyou. Et le voilà embarqué dans une tournée Kamikaze et sanglante dans Harlem.
« La règle du crime" est le deuxième volet de la trilogie que Colson Whitehead consacre à de Harlem. On y retrouve ce bon vieux Ray Carney qui essaie de décrocher de ses fréquentations douteuses. Une immersion en apnée dans le Harlem des années 70, un Harlem méconnaissable. Les voyous d’aujourd’hui n’ont plus d’honneur et encore moins de classe. Une fresque trépidante entre corruption, règlements de compte, difficile de faire la différence entre truands, flics et politiciens, tout le monde est pourri. Des personnages hauts en couleurs, le rythme est endiablé , violence et humour font bon ménage. Un roman qui ressemble à un bon vieux film de gangsters en noir et blanc. Un récit en trois parties inégales, la seconde m’a semblé un peu poussive, et puis tous ces meurtres et ces incendies criminellement ça donne un peu le vertige.
On retrouve Colson Whitehead avec un récit prenant qui nous immerge avec une alternance de personnages, de lieux plus ou moins hostile, avant la guerre de sécession, les grandes plantations de coton et l'esclavages, Underground railroad célèbre réseau clandestin d’aide aux esclaves en fuite, horreur, espoir, fuite et clandestinité afin d'accéder à une potentielle liberté.
Colson Whitehead rappel cette histoire de l'Amérique avec une plume puissante, poignante et bouleversante, un rythme intense, une oeuvre engagé, une belle découverte.
"Les vastes champs éclataient de centaines de milliers de capsules blanches, reliées entre elles à l'image des constellations dans le ciel par la plus claire des nuits claires. Quand les esclaves en avaient fini, les champs se retrouvaient dépouillés de leur couleur. C'était un processus magnifique, de la graine au ballot, mais aucun d'entre eux ne pouvait s'enorgueillir de son labeur. On les avait spoliés."
"Il arrive parfois qu'une esclave se perde dans un bref tourbillon libérateur. Sous l'emprise d'une rêverie soudaine au milieu des sillons, ou en démêlant les énigmes d'un rêve matinal. Au milieu d'une chanson dans la chaleur d'un dimanche soir. Et puis ça revient, inévitablement, le cri du régisseur, la cloche qui sonne la reprise du travail, l'ombre du maître, lui rappelant qu'elle n'est humaine que pour un instant fugace dans l'éternité de sa servitude."
Dans les années 60, aux USA, les maisons de correction avaient vocation à "rééduquer" les enfants. Elles accueillaient aussi de très jeunes enfants orphelins ou abandonnés.
Nickel Boys une de ces maisons était composée de trois structures : une pour les enfants blancs, une pour les enfants noirs et une dernière appelée "maison blanche" qui aurait pu être surnommée "maison rouge" car c'était là que les enfants désobéissants recevaient leur punition.
Les enfants, outre d'être orienté vers telle ou telle maison, en fonction de leur couleur, étaient classés par catégorie et pour en changer il fallait faire montre d'une parfaite obéissance, ils obtenaient des points leur permettant d'accéder à la catégorie supérieure et de gagner du temps pour leur libération.
Mais gare à celui qui tentait de s'enfuir..
C'est dans cet environnement qu'atterrira Elwood, un jeune noir, promis à un bel avenir, qui sera condamné à tort, pour vol de voiture. Condamné pour s'être trouvé au mauvais moment au mauvais endroit. Il va tout faire pour respecter les consignes, en se liant d'amitié avec Turner tout en prenant conscience que sa couleur n'arrangeait sa situation jusqu'au jour où...
Ce roman basé sur une histoire réelle est fort en émotions : empathie, colère, dégoût... et montre la nature humaine sous un jour fort peu glorieux : les figures d'autorité qui, aval l'aval des services sociaux, useront et abuseront de méchanceté, de cruauté voire de sadisme, les enfants qui tenteront de créer des liens tout en ne faisant jamais confiance car pour survivre dans cet enfer, il faut être prêt à vendre, dénoncer l'autre.
Ces maisons où régnaient une forte ségrégation étaient approuvées par la population et les autorités puisque les enfants étaient source de profit pour l'établissement en travaillant en son sein ou pour les notables extérieurs souvent membres du conseil d'administration.
Ce n'est que longtemps après leur fermeture que toutes les horreurs qui y avaient cours vont être connues de tous. Mais aucun des "bourreaux" y ayant sévi ne sera inquiété.
Ce roman, prix Pulitzer, a été un gros coup de coeur et s'il a le mérite de dénoncer cet épisode de la ségrégation et du traitement donné aux jeunes "délinquants" n'a malheureusement pas été suivi que de peu d'effets car bien que certains des enfants y ont fait un passage ont témoigné, la libération de la parole de la plupart d'entre eux n'a malheureusement pas encore eu lieu.
C'est le second livre de cet auteur que je lis, le premier Underground Railroad m'avait tout autant emballé. Je ne peux donc que vous conseiller de vous y plonger.
Avec Harlem shuffle, Colson Whitehead opère une rupture de ton et de genre avec son précédent roman Nickel Boys qui est un témoignage en hommage à la souffrance des enfants noirs au temps de l’apartheid aux USA.
Toutefois on y retrouve de commun, un ado lâché par ses parents, élevé par une vieille dame (non plus sa grand-mère mais sa tante) qui tourne le dos à la délinquance en s’appliquant à l’école et à travailler à son compte. Là, le héros ne devient plus patron d’une entreprise de déménagement mais commerçant avec sa propre boutique de meubles. Et, on assiste aux émeutes urbaines après le meurtre gratuit d’un jeune Noir par un policier Blanc.
Le roman est nettement moins dur que le précédent et est construit sur une parodie de polar qui semble être le prétexte choisi par l’auteur pour raconter Harlem.
De ce point de vue, j’ai bien aimé le livre. L’histoire en elle-même est un peu loufoque. Le héros, Ray Carney, attaché à son neveu qui ne fait que des bêtises, voire de très grosses bêtises, se voit impliqué avec des gros mafieux dans des histoires à rebondissements.
Ce que j’ai aimé c’est me promener à Harlem et Manhattan en découvrant la vie des quartiers et des pans d’histoires.
C’est pittoresque et très vivant car l’auteur en nous parlant de l’architecture changeante de New York (le livre s’arrête aux fondations des Tours Jumelles) et de la déco intérieure au fil des ans fait refléter un tableau social très parlant sans compter la vie de famille de Ray avec son épouse qui travaille dans une agence de voyages réservés au Noirs, style « Green book » avec des itinéraires qui les épargnent de biens des dangers.
Il révèle aussi les couches sociales dans le milieu afro-américain où la solidarité peut faire cruellement défaut. D’ailleurs les beaux-parents très cossus ont un regard condescendant sur le mari de leur fille.
De l’Apollo au Theresa Hôtel, on sillonne tout le quartier du nord au sud, du Malcolm X Bld à l’Hudson river, de la 128eme à West Harlem. La corruption est partout, de la pègre aux flics en passant par les notables. Wilfred Duke un ancien caïd va gérer les prêts sur Harlem pendant deux décennies jusqu’à ce qu’il lui arrive une petite bricole… Mais il est en est de même dans le Manhattan blanc et c’est à coup de milliards entre avocats, banquiers, mafia, assureurs qu’on s’approprie du terrain pour y construire tour sur tour et où le recel va bon train…
Une lecture récréative où Harlem est le personnage principal.
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