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Gabin, octogénaire, perd la tête mais le souvenir diffus de Solange, son grand et unique amour est très vivace; quelque chose le pousse à retourner à la combe où ils se sont rencontrés la première fois. Solange, elle, au même moment, est chez elle, elle vient de faire une chute dans l'escalier et ne peut plus bouger. Elle attend et espère que quelqu'un viendra; cette attente est propice au retour des souvenirs enfouis dont Gabin est le centre, Gabin dont elle s'est séparée, par besoin de liberté, mais qu'elle n'a jamais oublié.
J'ai fait connaissance de Cathy Galliègue à travers son précédent roman "Contre nature" qui a été une des quelques lectures les plus intensément émotionnelles de l'année 2020. J'attendais donc le dernier opus avec impatience, pressée de ressentir à nouveau tous les sentiments que l'écriture de l'auteure avait fait naître en moi.
Ce roman est totalement différent du précédent tant par les personnages, que les thèmes et l'environnement. J'apprécie qu'un auteur ne reste pas cantonné dans un seul univers et m'emmène sur des chemins différents chaque fois.
C'est un roman magnifique, fort, poignant qui se déroule dans le Jura au caractère rude et entier comme le sont ses habitants. Nous suivons les personnages (Solange et son frère aîné, Gabin) de leur adolescence à leur vieillesse. Tous trois ont eu une enfance marquée par la mort et la violence; tous trois sont attachés à cette terre du Jura, qu'on ne quitte jamais même si elle rend esclave. En revanche, la maison, qui chez la plupart des auteurs, est associée à la chaleur, au refuge, à l'amour et à la douceur, est ici synonyme de violence, de mort, d'enfermement.
Ce roman, c'est une ode à l'amour qui ne s'est concrétisé ni par un mariage, ni par des enfants mais qui a traversé les années, qui a accompagné Solange et Gabin même lorsqu'ils étaient loin l'un de l'autre, sans l'usure du quotidien comme un lien indéfectible qui n'a laissé de place pour aucun autre amour. C'est aussi une ode à l'amour absolu entre un frère et une sœur, unis dans leur résistance face à la violence du père et profondément liés jusqu'à leur mort.
Encore une fois, Cathy Galliègue m'a émue, m'a fait aussi sourire parfois; cette belle histoire d'amour, lumineuse malgré la solitude physique des deux personnages, réchauffés par ce sentiment profond qui ne les a jamais quittés, rend à la vieillesse toute son humanité malgré la maladie et l'usure du corps.
#Làoùmurmurelevent #NetGalleyFrance
Le pouvoir de résilience lié à l'écriture...trois destins de femmes emprisonnées d'abord à l'extérieur dans leurs vies au milieu de leurs souffrances puis en prison où Leïla va les réunir grâce à la lecture ,puis l'atelier d'écriture où le pouvoir des mots va libérer leurs histoires. Emue,je me suis laissée porter par l'écriture de l'auteure,belle,précise,métaphorique...Le destin de ces trois femmes détruites par le masculin marque,a-t-on pitié?Elles sont touchantes,ces femmes!Un livre précieux pour les émotions,les réflexions qu'il suscite:le pouvoir des mots!
C’est un roman polyphonique qui confronte le lecteur à trois « monstres » fabriqués par une société qui n’a pas mis l’humain au premier plan de ses préoccupations surtout lorsqu’il s’agit des femmes.
Car Pascale dite Culbuto, Vanessa surnommé Paradis et Leïla le Rat, sont avant tout des corps bafoués, abusés qui existent essentiellement comme objet et non comme sujet.
Dire que ces trois femmes étaient déjà en prison bien avant d’être derrière les barreaux est la triste réalité.
Culbuto c’est la mère infanticide, donc un monstre aux yeux de tous car cette femme énorme ne trouve grâce aux yeux de personne. Elle a fait de sa graisse un rempart contre les autres.
Paradis, Vanessa c’est le contraire sa beauté en a fait un objet pour les minus de sa cité jusqu’à ce qu’elle inverse les rôles, se protéger en livrant elle-même de la chair fraîche.
Leïla, le Rat de bibliothèque croit en la rédemption par les mots, ceux des livres qu’il faut apprendre à apprivoiser, à s’approprier pour pouvoir mettre des mots sur les maux.
Ne pas se laisser abuser c’est l’enjeu pour cela il faut se respecter soi-même, être consciente de sa propre valeur pour ne pas être une proie. Cela n’est pas inné mais cela s’apprend chaque jour.
« Comment avaient-ils pu ne rien voir ? Fallait-il qu’ils soient largués, tous les deux, pour avoir côtoyé un an son enfer et n’y avoir vu qu’une rébellion adolescente. »
J’ai écrit ce qui est le terreau sur lequel le lecteur va voir éclore des femmes, celles qu’elles sont car si les barreaux qui les enferment sont réels ils sont moins enfermant que les armures qu’elles s’étaient forgées dans leur vie libre.
C’est un livre bouleversant.
La construction du livre est à l’image du propos factuelle sans mièvrerie, sans misérabilisme, juste un regard humain.
Ce sont trois destins à contre-carrer pour devenir ce qu’elles auraient toujours dû être, des femmes uniques avec des qualités, des défauts, avec un avenir bien à elle.
Des femmes respectées car respectables. Personne ne doit s’approprier le corps de l’autre.
Je n’utiliserai pas le mot rédemption car il a une connotation religieuse, mais je dirai que leur délivrance passe par les mots et leur signification, par l’éducation qui est l’affaire de tous.
L’estime de soi se construit et dire non s’apprend. C’est ce chemin qu’emprunte ensemble ces trois femmes.
« J’ai donc eu ce soir-là, en rentrant chez moi, c’est-à-dire chez mes parents, une grosse boule de mépris calée au creux du ventre. Du mépris à mon encontre. Il ne m’a plus quitté jusqu’au jour où, bien longtemps après et d’une manière radicale, j’ai largué les amarres ! »
Ces figures emblématiques vous ne les oublierez pas, j’en suis certaine.
C’est le premier livre que je lis de Cathy Galliègue mais pas le dernier. J’ai beaucoup aimé cette plume qui dit avec délicatesse et force l’INDICIBLE.
Je remercie Masse Critique Babelio et les éditions du Seuil pour cette lecture.
©Chantal Lafon
Elles sont trois. Loin des trois déesses, tout au moins comme celles de la légende. Mais elles sont des femmes, des femmes qui vont voir leur destin basculer le jour où chacune commet l’inénarrable. La case prison est inévitable. A l’intérieur des murs, enfermement du corps, enfermement de l’âme dans un cadre où il vaut mieux passer pour une dominante que pour une blessée de la vie.
Pascale, Vanessa, Leïla. C’est cette dernière qui va rapprocher les deux autres. Qui sont-elles ?
Pascale est une mère infanticide que, forcément, la vox populi condamne à mort. D’ailleurs elle se déteste. Enfermée dans un corps gigantesque, elle rejette tout de sa personne. On peut la croire affabulatrice mais toutes les failles vont progressivement être découvertes. En attendant, sa vie en prison est du même enfer que celui d’avant, toutes se moquent de cet aspect difforme qui baisse la tête dès qu’un regard se pose sur elle.
Justement Vanessa n’est pas la dernière à se foutre de sa gueule, et même, à lui porter des coups. La belle jeune femme cache pourtant également son corps ; corps souillé, détruit lors de tournantes à répétition. Pour éviter les multiples viols dans la cave de l’immeuble elle a signé un pacte avec ses agresseurs acceptant l’inacceptable. Elle seule se retrouvera condamnée.
Leïla, elle, a un parcours sans histoire. Tout pour réussir jusqu’à son mariage... Bibliothécaire de métier elle continue à exercer son savoir dans les murs, parler avec les autres détenues, faire découvrir les livres, animer des rencontres. Quand Vanessa semble irrécupérable, elle lui met d’office un roman dans les mains : Vernon Subutex. Un choc ! Pour Pascale, ce sera Autant en emporte le vent. Choc également. Le début de la résilience. Par la lecture et par l’écriture. Les trois se mettent à raconter. A nous raconter.
Cathy Galliègue signe tout simplement une histoire bouleversante, une fiction aux teintes réelles et qui permet une immersion dans l’univers carcéral féminin. Elle nous guide progressivement à l’intérieur de ces trois femmes, nous ouvre des fenêtres pour voir au-delà des faits, au-delà des apparences.
Et au-delà des qualités romanesques et scripturales, ce livre renferme de salutaires valeurs : le rôle de la littérature, de la lecture dans les prisons, l’urgence d’aider les prisonniers à entamer une réinsertion et la nécessité pour chacun d’entre nous à ne pas subir : ces trois femmes ont trop accepté, ont trop caché les coups reçus, ont trop gardé pour elles les intimidations, les humiliations, la violence physique et verbale. Ne pas se taire pour ne pas se retrouver dans les ténèbres de l’enfermement.
Pour la forme, souligner encore la plume de Cathy Galliègue qui captive l’esprit comme un aimant, inclassable et singulière, une écrivaine que l’on aimerait voir entrer dans la cour des grands !
Un roman dur mais qui apporte une lueur d’espoir et un appel pour améliorer les conditions des femmes, celles qui sont encore libres, celles qui ne le sont plus. Puisse cette histoire traverser les couloirs éducatifs, les salles des pas perdus, les prétoires et tout simplement aller de mains en mains pour comprendre et arrêter de juger sans connaître.
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