Survivre au choc du 13 novembre, des livres pour comprendre

Après les attentats terroristes sans précédent qui ont frappé Paris vendredi soir, toute l’équipe de lecteurs.com partage l'immense émotion de la Nation et s’associe pleinement au deuil national.

Survivre au choc du 13 novembre, c’est prendre des livres pour comprendre. Les récentes publications d’écrivains, philosophes, psychologues sont autant d’outils pour déjouer la barbarie. Lecteurs.com en a identifié quelques-uns. Guide de lecture.

Le psy, le philosophe et les écrivains : quatre clefs pour dépasser l’effroi.

Le psy :

Malek Chebel, L’inconscient de l’Islam, (CNRS Editions)

Malek Chebel a beau être psychanalyste et anthropologue des religions, écrire ici chez les très sérieuses éditions du CNRS ? Ses livres sont toujours limpides et offrent des clefs passionnantes. Dans L’Inconscient de l’islam, écrit sans majuscule, il propose une immersion dans le monde des interdits arabes et musulmans, mais aussi dans les notions de faute, de transgression. Et dissocie volontiers ce qui tient de l’identité arabe et de la religion musulmane. Il éclaire les origines de ce qu’il appelle l’hooliganislam à travers notamment le concept original de « manternel », un néologisme constitué de maternel et… de mante religieuse. La raison du problème est-elle à trouver dans le sein des mères ?

A lire aussi la traduction du Coran par Malek Chebel, son formidable Dictionnaire amoureux des mille et une nuits (Plon) et, histoire de faire un pied de nez aux intégristes, Le Kamasutra arabe, 2000 ans de littérature érotique en Orient (Pauvert).

Les écrivains :

Yasmina Khadra, L’Attentat (Julliard)

Il y a dix ans, l’écrivain algérien le plus lu dans le monde sortait un texte terrifiant sur un fait divers vraisemblable : à Tel Aviv, un chirurgien israélien d’origine bédouine découvre que sa femme est le kamikaze responsable d’un attentat sanglant. Effondré, il cherche néanmoins à comprendre, remonte la filière du terrorisme et découvre ce que sa réussite sociale lui a permis de nier : la spoliation des Palestiniens vécue comme la négation totale d’un peuple. De l’apprentissage de la haine aux origines de la propre violence du héros, ce livre est une gifle retentissante, dont l’actualité est tragiquement indéniable.

Julien Suaudeau, Le Français (Robert Laffont)

Prodigieux et glaçant, c’est le deuxième roman d’un jeune écrivain remarqué pour un roman de colère, Dawa. Dans Le Français, sorti en août 2015, il décrit l’itinéraire d’un jeune du plateau d’Evreux qui devient l’un des plus terrifiants bourreaux de Daesh. Ecrit à la première personne du singulier, ce roman bref et blanc comme un coup de lame raconte sans juger. Car, selon l’auteur, « Il n'y a pas de monstre, ni de mal, en soi. Il n'y a que la vie qui vous écorche jusqu'à ce que vous ne soyez plus que cette douleur. La littérature doit s'intéresser à la complexité de cette descente aux abimes, pas voir les choses en noir et blanc ».

Le philosophe :

Abdennour Bidar, son œuvre sans modération, en commençant par sa Lettre ouverte au monde musulman (Les Liens qui libèrent)

Il est l’un des premiers philosophes musulman à avoir pris la parole après les attentats de janvier 2015. Sa « Lettre ouverte au monde musulman », qui invitait les croyants à interroger les racines du mal islamiste au cœur de leur religion, a fait le tour de la planète. Editée en avril dernier aux éditions Les Liens qui libèrent, cette Lettre ouverte au monde musulman, est à lire et à relire tant la responsabilité que ce grand intellectuel normalien et soufi appelle de ses voeux sort des clivages, de la culpabilité et des postures victimaires, dans un grand plaidoyer pour la laïcité.

Karine Papillaud