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Henry Pulling, banquier à la retraite, amateur de poésie lyrique et de jardinage, mène une paisible existence dans sa petite maison de banlieue. Bien ancré dans ses habitudes, il refuse obstinément la moindre interférence dans le courant de sa vie de célibataire. C'est compter sans l'irruption de sa tante Augusta, une femme excentrique de soixante-dix ans, charmante et volage, qui décide d'ouvrir les yeux de son neveu sur un monde résolument autre. Et celui de tante Augusta est sans tabous ni limites, entourée qu'elle fut d'hommes surprenants comme le révérend d'une église pour chiens ou M. Visconti, le grand amour de sa vie. Les voilà donc partis dans un tourbillon de voyages qui leur réserve bien des surprises.
« Je rencontrai ma tante Augusta pour la première fois en plus d’un demi-siècle aux obsèques de ma mère. J’ai toujours mené une existence paisible ; sauf un penchant pour les dahlias, je n’ai pas de violon d’Ingres. Autant de raisons qui ajoutaient aux obsèques de ma mère un brin de piquant nullement déplaisant…
Le service avait lieu dans un crématorium fort connu. L’assistance était assez maigre mais on la sentait aux aguets, parcourue de ce léger frémissement d’expectative que l’on n’éprouve jamais au bord d’une tombe. Et si les portes du four allaient refuser de s’ouvrir ? Le cercueil se coincer sur le chemin de la fournaise ? Derrière moi, j’entendis une voix, distinctement claire et vieille dire : « une fois, j’ai assisté à une incinération prématurée ».
C’était ma tante Augusta, arrivée en retard et vêtue assez comme notre chère et regrettée reine Mary se fût peut-être habillée, si elle eût été encore de ce monde et eût tant soit peu sacrifié à la mode actuelle.
_ C’est sûrement toi Henry, dit Tante Augusta
_ Oui, dis-je et c’est sûrement vous Tante Augusta
_ Cela fait bien longtemps que je n’avais eu signe de vie de ta mère. J’espère qu’elle a eu une mort facile.
_ Mon Dieu, oui, vous savez, à cet âge…le cœur s’arrête. C’est tout. Elle est morte de vieillesse.
_ De vieillesse ? Elle n’avait que douze ans de plus que moi ! se récria Tante Augusta d’un ton accusateur.»
Les deux premières pages du roman ne sont pas terminées que le lecteur hésitant abandonne toute réticence pour plonger avec délice dans ce bijou d’humour british.
Après un passage assez hilarant où il est question des cendres de la défunte (comment ne pas penser que les frères Cohen y ont emprunté une des scènes cultes du fameux The Big Lebowski ?), notre banquier à la retraite va délaisser ses chers dahlias et une existence aussi morne qu’un dimanche après-midi pluvieux devant un pub fermé pour suivre les aventures excentriques de sa tante ; elles le conduiront de Boulogne à Istambul et de Buenos Aires à Asuncion où il comprendra enfin, ce que le lecteur avisé avait pressenti un peu avant lui, qui est vraiment cette tante qu’il découvre tardivement si attachante.
Les réflexions sur la vieillesse, l’ennui (l’auteur en a beaucoup souffert dans sa jeunesse), l’attrait des voyages et le charme des activités illicites sans oublier une pincée du complexe d’infériorité de beaucoup de britanniques vis-à-vis des Américains sont toujours habilement dissimulées derrière les minauderies de la tante et la naïveté ravie du neveu dont le conformisme vole en éclats au fil des pages.
Lecture pleine d’ un humour qui fait mouche à tous les coups ; l’auteur s’est amusé, paraît-il… moi aussi !
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